Paris 2024 : des Jeux d’été militants, féministes et inclusifs

Article : Paris 2024 : des Jeux d’été militants, féministes et inclusifs
Crédit: © Pawel Kopczynski / Reuters
30 juillet 2024

Paris 2024 : des Jeux d’été militants, féministes et inclusifs

Depuis le 26 juillet, le monde entier a les yeux rivés sur Paris. 100 ans après, la capitale française accueille à nouveau les Jeux olympiques, et pour la cérémonie d’ouverture, Paris a vu les choses en GRAND. La ville a tenu à mettre en avant des icônes féministes et des valeurs progressistes, ce qui n’a visiblement pas plu à tout le monde…

Pour la toute première fois dans l’histoire des Jeux olympiques, la cérémonie d’ouverture s’est tenue hors d’un stade. Le défilé des différentes délégations participantes a eu lieu sur la Seine. Assez romantique et glamour à mon sens, et bien illustratif de la classe et de l’élégance que l’on connaît à la France.

Près de cinq jours après la cérémonie d’ouverture des Jeux d’été 2024, les débats et même les polémiques vont bon train. D’une part, elle est considérée comme la meilleure cérémonie d’ouverture de l’histoire des Jeux olympiques, et certains estiment même qu’elle a été plus spectaculaire que la cérémonie d’ouverture des Jeux de Pékin 2008. D’autre part, elle est perçue comme une ode à la propagande wokiste.

La drag queen Nicky Doll défile sur la Passerelle Debilly, lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris, le 27 juillet 2024 © Tingshu Wang / Reuters

Les plus mécontents la comparent à une gay pride en référence aux représentations mettant en avant un trouple, ainsi qu’aux danses lascives des drag queens. Même la communauté chrétienne y a ajouté son grain de sel, jugeant inacceptable et blasphématoire le tableau faisant étrangement référence à la Cène. Quoi qu’il en soit, cette cérémonie d’ouverture des Jeux de Paris 2024 n’aura laissé personne de marbre.

L’un des tableaux qui a quasiment fait l’unanimité est celui de la sororité. Dix femmes qui ont marqué l’histoire de l’hexagone ont été magnifiquement mises en avant à travers des sculptures créées spécialement pour les Jeux, et dont la ville lumière sera désormais dotée. Pourquoi cette représentation est-elle autant significative et symbolique ? Cet article vous donne plus de détails.

Des Jeux pour rendre hommage aux femmes qui ont fait la France

Depuis son histoire monarchique et royale, les femmes ont été de tout temps au-devant de la scène en France. Elles ont bâti la France et continuent de contribuer à son rayonnement. Si la tête décapitée de Marie-Antoinette, dernière reine de France, guillotinée, a suscité des réactions mitigées lors du passage du tableau « Égalité », il n’en demeure pas moins que le tableau de la sororité a ému plus d’un.

D’Olympe de Gouges à Simone Veil, en passant par Gisèle Halimi, le tableau sororité a permis de mettre à l’honneur des femmes aux parcours atypiques qui ont marqué leur époque à travers les combats qu’elles ont menés pour l’égalité homme-femme et surtout pour la postérité.

Olympe de Gouges, pionnière du mouvement féministe en France

Considérée comme la première féministe de France par Benoîte Groult notamment, Olympe de Gouges fut l’autrice de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne du 5 septembre 1971. Dès le préambule de cette déclaration, elle interpelle directement les hommes : « Homme, es-tu capable d’être juste ?  C’est une femme qui t’en fait la question ; tu ne lui ôteras pas du moins ce droit. ». Son audace, qui lui a sans doute valu la guillotine, lui a permis de revendiquer haut et fort le droit de vote pour les femmes, l’égalité aux emplois et le droit pour les femmes d’avoir accès à la propriété privée.

Plaque apposée au n° 20 de la rue Servandoni, Paris 6e, où résida Olympe de Gouges (1748-1793), auteur de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, Wikimedia Commons/MU

Dès l’article premier de sa déclaration, elle rappelle que la femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. Elle lutte entre autres pour la liberté d’opinion, l’union libre, la création de maternités. Pour Olympe de Gouges, « la femme a le droit de monter sur l’échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la tribune ».

Les Jeux olympiques de Paris 2024 viennent donc, en quelque sorte, ressusciter cette grande révolutionnaire qui s’est farouchement battue pour l’égalité entre les hommes et les femmes, et cela, au prix même de sa liberté et de sa vie.

Simone Veil, l’éprise de justice et femme politique de grand calibre

Rescapée d’Auschwitz où elle fut déportée à 17 ans, Simone Veil est une femme dont le destin aurait pu être tout autre, n’eût été sa résilience, sa force et sa ténacité. Magistrate, ministre, puis première présidente du Parlement européen, elle incarne le symbole de la lutte pour le droit à l’avortement des femmes. La loi Veil sur l’avortement est principalement le fruit de son combat inlassable pour dépénaliser l’avortement en France.

Simone Veil © MPP

Constitutionnalisé en mars 2024, ce droit est aujourd’hui une garantie constitutionnelle indéboulonnable. C’est donc à juste titre qu’elle figure parmi les personnalités féminines mises en avant par le tableau de la sororité présenté au cours de la cérémonie d’ouverture des Jeux de Paris 2024. La symbolique de cette représentation est encore plus forte lorsque Gisèle Halimi la compose. Deux femmes aux destins liés, peut-on dire !

Gisèle Halimi, militante téméraire pour les droits des femmes

C’est en 1972 que Gisèle Halimi est sous le feu des projecteurs avec l’historique procès de Bobigny. Signataire du « manifeste des 343 » au même titre qu’une certaine Simone de Beauvoir, laquelle ne pouvait manquer à ce « club des 10 » dont les sculptures trônent aujourd’hui près de l’Assemblée nationale française, Gisèle Halimi est une avocate qui a largement contribué à faire évoluer le débat sur l’avortement en France.

Gisèle Halimi, le 6 mars 2004 à Fès, lors d’une conférence organisée par le magazine français Le Nouvel Observateur sur les femmes des deux rives de la Méditerranée © AFP – ABDELHAK SENNA

Comme elle le dit elle-même à la sortie du procès de Bobigny, celui-ci représente un pas irréversible pour le droit à l’interruption volontaire de la grossesse (IVG). Décédée en 2020, la Seine olympique, avec son sixième tableau « sororité », salue la mémoire et le combat d’une femme inoubliable qui a dédié sa femme à œuvrer pour le bien-être et l’épanouissement des femmes. L’une de ses phrases marquantes demeure : « C’est juste que l’histoire leur a dicté cette attitude de réserve, voire de retrait : une femme ne doit pas faire de bruit, ne pas déranger, ne pas se faire remarquer, ne pas avoir l’esprit de compétition, ne pas chercher la gloire. Ça, c’est réservé aux hommes ».

Heureusement que ces Jeux de Paris 2024, démontrent que les femmes ont leur place dans toutes les sphères, et plus encore dans le sport. En effet, elles représentent la moitié des athlètes présents à Paris, une véritable avancée saluée par le Comité international olympique (CIO) lui-même.

Des Jeux avec des figures féminines en tête de liste pour les festivités

Au-delà de la célébration du sport, les Jeux olympiques représentent également un véritable moment de fête. Et qui dit fête, dit musique ! Depuis le printemps 2024, la rumeur était lancée sur la participation de la star Aya Nakamura à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques. Jusqu’au bout, elle aura été un véritable mystère que même le Président de la République française a contribué à entretenir. Et, lorsque la québécoise Céline Dion et l’américaine Lady Gaga ont débarqué à Paris quelques jours avant l’ouverture des Jeux, les médias se sont déchaînés. Très vite, il a été question de leur participation au lancement des festivités des Jeux olympiques.

Lady Gaga lors de son show à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris, le 26 juillet 2024 © AFP – ARIS MESSINIS

Aya Nakamura, symbole de la mixité de la France aux JO de Paris 2024

Si très tôt la participation de la star franco-malienne aux festivités des Jeux d’été a déclenché une vague d’indignations, de consternations et parfois de comportements à caractère raciste dans le rang de l’extrême-droite française, la star a tout de même brillé en réalisant une performance assez remarquable.

Des militants et sympathisants de l’association SOS Racisme ont manifesté leur soutien à Aya Nakamura © Jules Bois, RFI

Habillées par la célèbre maison de haute couture française Dior, Aya Nakamura et ses danseuses ont apporté une touche colorée à la soirée d’ouverture des Jeux olympiques. Le choix des organisateurs des JO sur sa personne est loin d’être fortuit. En effet, à travers sa prestation, la France expose sa diversité et sa multiculturalité aux yeux du monde. Issue de banlieue et chantant essentiellement en argot, sa prestation témoigne de la mixité de ce vieux pays du vieux continent. C’est aussi un appel à l’union de tous les Français dans la diversité.

Malgré les critiques acerbes dont elle a victime durant de longues semaines, la star a enflammé le pont des Arts, lieu emblématique reliant le musée du Louvre à l’Institut de France. En plus d’un medley de ses titres les plus connus tels que ʺPookieʺ et ʺDjadjaʺ, la chanteuse a gratifié le public d’un pan de la célèbre chanson ʺFormidableʺ de l’illustre Charles Aznavour.

Aya Nakamura lors de la cérémonie d’ouverture des JO © AFP – ESA ALEXANDER

Et comme un doigt d’honneur à tous ceux qui l’ont lynchée dans les médias ou à travers les réseaux sociaux, la « reine de France » était accompagnée de soixante (60) musiciens de la Garde républicaine, et de trente-six (36) choristes du chœur de l’armée française. On s’en souviendra encore longtemps de cette rencontre improbable, mais unique entre les époques, les cultures, la tradition et a modernité, au nom de la liberté.

Axelle Saint-Cirel, la Marianne Guadeloupéenne des JO de Paris 2024

Très peu connue du public jusqu’à sa prestation iconique livrée au cours de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024, la jeune femme de 29 ans a mis tous les Français et le public international dans sa poche. Les éloges à son endroit n’en finissent plus depuis son interprétation magistrale de la marseillaise sous le ciel pluvieux de Paris.

Dans sa tenue imaginée par Maria Grazia Chiuri (encore une femme mise à l’honneur pour ces JO), directrice artistique de la maison Dior, la mezzo-soprano à la touffe crépue, vêtue d’une sublime robe à l’image du drapeau français, a entonné l’hymne national depuis le toit du Grand Palais. Sa prestation fut incontestablement l’un des moments forts de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques. De sa voix envoutante, Axelle et la soixantaine de choristes féminines qui l’accompagnaient, ont su parfaitement fédérer et unir la France autour de ses couleurs bleue, blanc et rouge. Un pur bonheur pour les yeux, et un véritable régal pour l’ouïe !

Céline Dion, la reine des Jeux olympiques de Paris 2024

Quelle résurrection pour l’une des chanteuses les plus célèbres de son époque ! Après Atlanta 1996, la chanteuse canadienne a encore illuminé la soirée d’ouverture des Jeux olympiques avec sa voix gracieuse.

Céline Dion interprétant l’hymne à l’amour sur la Tour Eiffel © AFP POOL / OLYMPIC BROADCASTING SERVICES

Souffrant de la maladie de la personne raide l’ayant obligée à s’éloigner des concerts et tournées durant plusieurs années, la star renait de ses cendres pour les Jeux olympiques de Paris. Pour l’occasion, Dior l’a magnifiquement sublimée. Vêtue d’une création brodée de milliers de paillettes et composée de plus de 500 mètres de franges, Céline Dion a offert au monde entier une interprétation brillantissime de l’hymne à l’amour de la très adulée et regrettée Edith Piaf. L’émotion et toute la grâce dans sa voix ont arraché des larmes à plus d’un.

De ces Jeux qui sont déjà inscrits dans l’histoire, on retiendra que les femmes ont brillé. Elles étaient sur tous les fronts. Le « Bonjour, bienvenue à Paris » de l’immense Lady Gaga avait déjà annoncé les couleurs de cette cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques qui a fait la part belle aux femmes. C’est une belle victoire, une reconnaissance du talent de toutes ces femmes, qu’elles soient musiciennes ou athlètes. Espérons également que Los Angeles 2028 soit des JO de la parité.

Partagez

Commentaires